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OA 학술지
Etude sur l’identite du migrant a l’adolescence - une approche psychodynamique 청소년기의 이민 정체성에 관한 고찰 ? 정신역동적 접근
  • 비영리 CC BY-NC
ABSTRACT
Etude sur l’identite du migrant a l’adolescence - une approche psychodynamique

본 연구는 이민 상황에 있는 청소년의 정체성에 대한 것으로 정신역동적 접근에서 이론적으로 고찰한 논문이다. 청소년기는 정체성을 형성하는데 특히 중요한 시기로 이민 상황에 처하여 두 문화 사이에서 정체성을 형성하는 것이 이들에게는 특히 어려운 과업이 될 수 있다. 청소년들이 어떠한 정체성 형성 과정에 처해있는가를 이해하는 것은 이들의 성공적인 이민 사회 적응에 많은 도움을 줄 것이다.

이민자의 정신건강에 대해서는 많은 연구가 있어왔는데 특히 부적응적인 측면에서 접근한 연구가 많으며, 고위험군으로 분류되는 경우가 많다. 그러나 이민자 중에는 큰 성공을 하는 사례도 있다는 것도 주목할 만한 사항이다. 여러 연구를 통해 이민자들의 정체성을 부정적 정체성, 주변인적 인간, 문화적 복합체, 경계적 실제, 세계시민, 이중적 실제 등으로 정의 하고 있다. 이러한 정의는 이민자들이 이민국의 문화와 모국의 문화 사이에서 사회문화적인 갈등과 적응 과정을 통해 자신의 정체성을 형성해가는 모습을 묘사한 것으로 이민국에서 성장하는 청소년들이 어떻게 자신의 개인적 정체성을 형성하는지를 잘 보여주고 있다.

본 연구에서는 이민자들의 정체성을 이민국의 문화정체성과 모국의 문화정체성을 비교하는 것이 아니라 “제3의 정체성”으로 명명하면서 이민자들 고유의 정체성 특성을 살펴볼 것을 제안한다. “제3의 정체성”은 한창 정체성을 형성하는 과정에 처해 있는 청소년들에게 이민국에서 혹은 모국에서의 적응문제와 사회심리적 문제들을 해결하고, 자신 고유의 정체성 통한 자존감을 향상시키는데 기여하는 요인이 될 수 있을 것이다.

KEYWORD
adolescent , Identite , Immigration , France , culture
  • I. Introduction

    L’immigration constitue une réalité sociale avec des enjeux économiques, politiques et psychosociologiques. Elle provoque à la fois la confrontation entre groupes sociaux et la confrontation entre l’image de soi et celle de l’autre. Ainsi, elle exacerbe inévitablement la problématique identitaire et met en évidence certains mécanismes identitaires fondamentaux. Chez les adolescents, l’immigration constitue encore plus une situation inconfortable, situation génératrice de stress, d’anxiété, de conflit, d’inadaptation.

    La santé mentale des immigrés a été beaucoup étudiée dans des recherches en termes de l’inadaptation, la sélection négative, le déracinement, la rupture, etc. (Sabatier ; 1999)1) L’inadaptation due à une mauvaise maîtrise de la langue du pays d’accueil chez les immigrés est très vite contredite par d’autres explications. D’ailleurs, elle n’explique pas suffisamment la réussite des immigrés et les problèmes de la deuxième génération qui ne montrent pas de problème de langue.

    Aujourd’hui, les immigrés sont considérés comme « un groupe à risque ». Cependant, étant donné que le risque ne constitue pas une fatalité dans leur santé mentale et que certains immigrés s’adaptent de façon exceptionnelle et beaucoup plus forte que des autochtones, on demande de ne pas aborder ce sujet par une approche des problèmes.

    En effet, dans ce groupe, comme dans beaucoup d’autres groupes, « il existe des facteurs de protection et des facteurs aggravants parmi lesquels il faut citer des indices sociodémographiques, des caractéristiques de la personnalité et des contextes sociopolitiques tant du pays d’accueil que du pays d’origine (Groupe d’étude sur la santé mentale des immigrants et des réfugiés, 1988 ; Salvendy, 1983). »1)

    Dans cette recherche, nous allons évoquer l’adolescence dans une situation d’immigration et quelques concepts sur l’identité du migrant et ce, dans le but de mieux comprendre les adolescents immigrés qui sont en construction d‘identité.

    1)Sabatier C. (1999), Adolescents issus de l’immigration ; les clichés à l’épreuve des faits, in Propos sur l’enfant et l’adolescent, Paris, l’harmattan, p. 361. Sabatier C. (1999), op. cit., p. 362.

    Ⅱ. L’adolescence en immigration

    Les adolescents immigrés appelés comme « une deuxième génération » en situation d’immigration, est défini selon Noiriel (1988) ceux qui sont nés en France ou sont venus en France quand ils étaient petits. Au niveau le plus général, le terme de « deuxième génération » désigne le processus sociologique par lequel des individus sont soumis à des formes contradictoires de socialisation, à cet âge décisif des acquisitions fondamentales qu’est l’enfance.

    D’un côté, l’enfant acquiert ses premiers apprentissages au sein de son milieu d’origine, dans la famille et fréquemment dans le groupe que constituent les immigrants de première génération repliés sur l’entre soi communautaire. De l’autre, il se heurte aux normes dominantes du pays d’accueil : inculquées par les enfants français du même âge et par les représentants des différentes institutions auxquelles l’enfant est soumis.

    La différence essentielle par rapport à la première génération se trouve donc dans la confrontation entre la société d’origine et la société d’accueil qui se situe au moment même des apprentissages décisifs. Ainsi, ces enfants se trouvent dans plusieurs univers, plusieurs logiques et plusieurs appartenances. Cette situation donne à ces enfants d’une part une potentialité créatrice du risque transculturel, risque fondateur de la civilisation, et d’autre part, une richesse apportée par plusieurs cultures.2)

    D’un point de vue classique et le plus courant, l’enfant en situation migratoire est considéré comme « l’enfant à risque ». Dans ce sens, les auteurs ont évoqué l’enfant sacrifié, l’enfant exposé et l’enfant vulnérable. L’enfant sacrifié qui se trouve à l’opposé de « l’enfant initié » se caractérise comme un enfant ayant une bonne capacité intellectuelle mais ne pouvant pas l’exprimer ; il ne montre pas de troubles psychopathologiques patents, cependant on trouve chez cet enfant des signes inquiétants, comme l’échec scolaire ou social ; on constate une rupture importante dans la relation affective et fantasmatique avec ses parents.

    On peut comparer cette notion à celle de « l’enfant symptôme »3) qui est un concept introduit pour l’analyse d’interaction fantasmatique entre parent et enfant. Dans certaines situations de parent‐enfant, on observe un phénomène où l’expression du désir de l’enfant peut être modifié par le désir des parents dont la conséquence est ce qu’on appelle « l’enfant symptôme ».

    Ensuite, l’enfant issu de l’immigration est un « enfant exposé » à un risque spécifique, risque transculturel, lié au phénomène migratoire. C’est un risque lié à une nouvelle naissance (Mahler) et au métissage culturel (Moro). Pour Mahler, sur le plan psychologique, la migration favorise une nouvelle naissance (individuation), et en cas de dysfonctionnement (échec du processus de séparationindividuation), elle provoquerait une maladie. Cependant, elle peut conduire aussi à un développement du potentiel créateur de l’individu.

    Selon Moro, le risque culturel pourrait être entraîné d’une part par l’écart entre le familier et l’étranger, et d’autre part, par le dédoublement des repères et des connaissance des systèmes culturels en question. Elle évoque quelques ingrédients du risque transculturel : « rupture migratoire des parents transmise aux enfants sous forme de trauma non élaboré, ambiance de la migration et vécu douloureux de ses conséquences, difficultés à investir le monde extérieur sans guide, mauvaise estime de soi des parents soumis à de multiples attaques et à des situations non anticipables, transmission chaotique des valeurs, carences identificatoires et clivage des enfants qui vont grandir dans ce contexte. »4)

    On évoque également l’enfant de migrant comme « l’enfant vulnérable ». La notion de vulnérabilité est introduite en 1974 par Anthony J. qui décrit un enfant montrant une certaine forme de fragilité et de moindre capacité de résistance et une grande sensibilité aux attaques.5) Dans un sens plus élargi, la vulnérabilité chez l’enfant est une difficulté à mobiliser ses ressources et sa facilité à se désorganiser. Ainsi, l’enfant se trouve dans des situations de « la fragilité du sentiment d’exister et de la sécurité interne, qui reposent autant sur le corps que sur la relation, ainsi que sur le noyau intime autour duquel chaque être humain se constitue. »6) Or, l’enfant en situation d’immigration est considéré comme un enfant vulnérable dans sa structure psychologique.

    Pendant longtemps, les recherches sur les enfants en immigration ont été faites davantage dans l’orientation de l’inadaptation (l’enfant à risque). Depuis peu de temps, on commence à regarder le côté positif de ces enfants. En effet, les enfants de migrants ne sont pas toujours en échec scolaire ou social. Ils montrent aussi des réussites spectaculaires. Certains auteurs ont déjà parlé de l’enfant de migrant en terme de « l’enfant parentalisé ». C’est un des phénomènes courants chez les enfants en immigration qui montrent plus de responsabilité et de maturité par rapport à leurs camarades. Ainsi, ces enfants prennent un rôle important dans la vie familiale en jouant le rôle de guide dans une situation transculturelle.

    Ils apprennent la langue plus vite que leurs parents et deviennent des guides pour ceux-ci dans un monde mal connu, régi par des règes difficiles à intégrer (l’enfant comme écrivain public ou assistante sociale). Ce phénomène aboutit à une inversion des générations dans laquelle l’enfant devient le parent de ses propres parents. Le rôle de guide est d’autant plus important que le milieu social est défavorisé.

    Les enfants de migrants sont considérés comme vulnérables à cause de leur biculturalité qui les fragilise sur le plan culturel et psychologique. Mais cela n’empêche pas de rencontrer des enfants, adolescents qui réussissent bien à l’école et s’adaptent bien à la société où ils vivent malgré les difficultés rencontrées. Certains décrivent ce phénomène comme « une réussite paradoxale ». Aujourd’hui, on parle de la deuxième génération, enfants de migrant en terme d’enfant résilient7).

    Dans le cadre scolaire, la résilience est considérée souvent comme une réussite paradoxale : « la résilience serait un facteur d’intensité variable qui expliquerait donc aussi l’efficacité ou l’inefficacité des stratégies de ‘‘coping’’ mises en place dans des situations posant des problèmes relationnels. (⋯) Du point de vue des performances scolaires, on attribuera à une résilience forte la réussite ‘‘paradoxale’’ des enfants ‘‘à risques’’ et à une résilience faible l’‘‘échec paradoxal’’ de ceux qui ‘‘ont pourtant tout pour réussir’’ »8).

    La résilience chez les enfants en situation migratoire, peut être « les facteurs qui permettent de maîtriser le risque transculturel et par là même de le transformer en potentialités créatrices pour l’individu et les sociétés. »9) Dans ce sens, la migration peut être un déclenchant de résilience à condition qu’elle puisse générer des potentialités créatrices, en quelque sorte un trauma créateur (traumatisme psychanalytique). En effet, la transformation de risque en capacités créatrices serait un enjeu thérapeutique dans une consultation.

    Bien que le métissage culturel soit un facteur fragilisant, « il peut devenir enrichissant lorsque les deux pôles culturels sont reconnus et acceptés par l’individu ce qui est loin ’être évident à l’adolescence, période de construction de l’identité. »10) Ainsi, la capacité de reconnaissance et d’acceptation en particulier de deux cultures en même temps serait un facteur de résilience qui favoriserait l’adaptation de cette population à la situation biculturelle.

    2)Moro M.R. (1998), Psychothérapie transculturelle de l’enfant et de l’adolescent, Paris, Dunod.  3)Dayan J. (2000), in Dictionnaire de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent, PUF, p.234.  4)Moro M.R. (1998), op. cit., p175.  5)Visier J.‐P. (2000), in Dictionnaire de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent, PUF, p. 774.  6)Visier J.P. (2000), Idem.  7)Cf. Bouteyre E. (2004), Réussite et résilience scolaires chez l’enfant de migrants, Paris, Dunod.  8)Gayet D. (1998), Ecole et socialisation ; Le profil social des écoliers de 8 à 12 ans, Paris, l’Harmattan, p. 294.  9)Moro M.R. (1998), op. cit. p. 64.  10)Moro M.R. (1998), op. cit. p. 106.

    Ⅲ. L’identite du migrant

    Nous allons évoquer maintenant quelques concepts sur l’identité du sujet qui se trouve entre deux cultures.

       1. Le concept d’≪ identite negative ≫

    Le concept d’« identité négative » est un concept introduit par Erikson. Il définit l’ensemble des traits que l’individu apprend à éviter. Cette identité négative se construit en même temps que l’identité positive11). En effet, aux identifications positives et aux assimilations faites par l’individu correspondent des rejets sélectifs, des oppositions qui refoulent tout ce qui est dévalorisé. L’identité négative est ainsi une image dévalorisée et repoussante de l’identité. Elle est un contre‐modèle d’orientations des conduites.

    Selon Erikson, des troubles de l’identité surviennent lorsque les modèles identificatoires nécessaires à la construction de l’identité sont dévalorisés par le milieu social, lorsqu’ils sont donc présentés comme des identités négatives. Or, l’identité se construit normalement par la négation d’un certain nombre de traits identitaires attribués par l’environnement social. Dans la crise d’identité inhérente à l’âge qui est celui de l’adolescence, les adolescents adoptent une attitude de rejet vis-à-vis de leurs modèles identificatoires habituels et partent à la recherche de nouvelles identifications.

    Dans certains cas, écrit Erikson, « l’identité négative est dictée par la nécessité de trouver ou de défendre un petit coin bien à soi contre les idéaux excessifs, exigés par des parents à l’ambition morbide ou effectivement réalisés par des parents de type supérieur. Dans les deux cas les faiblesses et les désirs inexprimés des parents sont reconnus par l’enfant avec une clairvoyance catastrophique. »12)

    L’identité négative est un processus normal d’acquisition de l’identité. Dans son origine, le sentiment d’identité évoque inévitablement un sentiment de négativité. Nous pensons que le problème est que soit on renforce ce sentiment de négativité qui fait obstacle à l’acquisition de l’identité, soit on refuse cette négativité qui prolonge un état de fusion qui provoque aussi un phénomène pathologique dans la construction de l’identité. Donc notre hypothèse est que si on accepte la différence, c’est-à-dire si on dépasse le processus de ce sentiment de l’identité négative, cela veut dire que l’on accepte l’autre.

       2. La notion de l’≪ homme marginal ≫

    Park, l’un des chercheurs éminents de l’Ecole de Chicago, parle de l’« homme marginal ». Cet homme marginal est typiquement un émigrant de la deuxième génération, qui est victime des effets de la désorganisation du groupe familial, et qui sombre dans la délinquance juvénile, la criminalité, etc. Park, à partir de 1934, applique cette nomination de l’« homme marginal » à la situation des travailleurs noirs des Etats du Sud, qui vivent « en marge » de la culture blanche.

    Cependant, l’homme marginal, tel qu’il est défini par cet auteur, n’est pas seulement celui qui est issu d’une race ou d’une culture différente, c’est tout aussi celui qui se situe généralement, à mi-chemin entre la culture tribale plus traditionnelle et celle, qui l’est moins, relevant de la vie urbaine moderne.

    Ainsi, Park va considérer également comme des marginaux les Cajuns de Louisiane qui sont d’origine française, les montagnards des Appalaches, qui sont, eux, de purs Anglo‐Saxons13). Bref, l’homme marginal est typiquement un migrant, qu’il soit d’origine européenne, Noir du Sud venu à la ville pour chercher du travail, ou encore simple paysan américain subissant l’exode rural !

    Selon Park, la personnalité marginale se définit chez un individu lorsque celui-ci « s’est trouvé involontairement initié à deux ou plusieurs traditions historiques, linguistiques, politiques, religieuses, ou à plusieurs codes moraux »14). L’homme marginal se trouve en conflit psychologique entre plusieurs mondes sociaux, conflit dont l’intensité varie d’un individu à un autre.

    L’homme marginal, se sentant rejeté, car non totalement assimilé, élabore un monde nouveau à partir de la diversité de ses propres expériences culturelles. Il adopte alors le plus souvent des attitudes critiques vis-à-vis de la culture dominante, ses hypocrisies et ses contradictions, culture dans laquelle il se sent rejeté malgré ses efforts pour s’y intégrer.

    Il peut être qualifié comme celui qui appartient à la fois à plusieurs milieux contrastés et antinomiques et devant ces attentes contrastées l’individu se trouve momentanément dans une situation conflictuelle ; ou bien « ayant intégré les normes de l’un et de l’autre, il se trouve en conflit persistant⋯ C’est cet individu appartenant à des groupes aux normes antinomiques qui peut être qualifié de marginal. »15)

    Le marginal ou l’homme migrant « se trouve à la marge de deux cultures sans appartenir pleinement à l’une ou à l’autre. Par extension, il peut être également à la fois frontière de deux ou de plusieurs systèmes de référence dont valeurs sociales et normes culturelles diffèrent nettement. »16) Il vit dans une situation où le conflit est momentané ou persistant et il peut vivre des situations de crise parfois très aiguës.

       3. La notion d’≪ hybride culturel ≫

    Coulon écrit que ; « l’Ecole de Chicago a développé une vision optimiste de l’immigration, sous la forme de l’homme marginal, qui devient un hybride culturel, partageant intimement deux cultures distinctes, mais pleinement accepté dans aucune et marginalisé par les deux. »17)

    C’est aussi au criminologue Sellin qu’appartient le mérite d’avoir introduit cette notion d’« hybride culturel » en sciences sociales18). C’est le conflit entre deux cultures différentes qui produit ce genre d’hybrides culturels. Le crime serait, selon cet auteur, la conséquence d’un conflit de culture : une opposition entre prescriptions de la loi d’un État et les normes particulière d’un groupe en son sein. Dans la mesure où les sujets n’ont intégré que partiellement et seulement des fragments des deux cultures de base dont ils comprennent vaguement des éléments, ils adoptent alors une sorte de « troisième pseudosous‐culture », quelque chose qui serait de l’ordre d’une « troisième identité ».

    Mais les processus de construction, plutôt mimétique, de cette nouvelle identité devenue légitime par l’adhésion à cette autre nouvelle culture communément partagée par un groupe plus ou moins large de population, les processus d’une telle construction doivent être compris non seulement comme des processus défensifs, mais aussi et surtout comme des aménagements spécifiques du fonctionnement psychique, relativement « installés » dans la durée : c’est-à-dire que ces aménagements régleraient aussi bien le mode de fonctionnement intra‐psychique du sujet, que le mode de relation qu’il établit avec le monde extérieur.

       4. La notion de ≪ figure de frontiere ≫

    Certains proposent de donner l’image de « figure de frontière » aux immigrés. Raoult évoque une notion de « figure de frontière » dans son étude sur la création d’un établissement de CERPP (Centre d’Etudes et de Recherches Psychomotrices et Psychothérapiques). Selon cet auteur, une institution créée nouvellement se trouve aux frontières ou bien à la traversée de frontières dans lesquelles elle est en rupture avec une autre institution qui existe déjà mais qui a échoué dans ses buts. En observant l’effet frontalier de nouvelle institution, l’auteur compare la traversée de frontières à une « fonction migrante ».

    La fonction migrante dans « le figure de frontière », consiste à construire les éléments d’identification collective structurés et ce, par quatre opérations princeps : la différenciation, la traduction, la régulation et la relation. Elle représente une relation entre l’ici et l’ailleurs et s’engage à assurer « une double fonction interne et externe selon des raisons stratégiques, culturelles et symboliques.»19)

    La fonction migrante est ainsi concernée pour redéfinir la frontière elle-même et ce, par une reformulation de l’identité et par un travail de légitimation. L’objectif de ce fonction migrante est de modifier les axes de contradiction et de contrariété. La rupture paraît une condition nécessaire dans l’établissement identitaire en permettant la différenciation, pour et/ou à partir d’une nouvelle topique. Et la crise de fonction migrante est une fragilisation des frontières ou des limites, voire même leur dissolution entre dedans et dehors et entre un avant et un après.

    A partir de la notion de fonction migrante, l’auteur s’intéresse à définir la « figure du migrant » qui peut être élargie à l’image de l’être-humain d’entre‐deux‐cultures, les immigrés. Selon Raoult, la notion de « figure de migrant » est définie comme suit : la désinscription ou malinscription du migrant le démarque dans son rapport au code socioculturel de réception.

    Le migrant acquiert, avec la singularité de son point de vue, la potentialité de questionner la représentation territoriale au niveau de ses instances, « au niveau du représentant du désir refoulé en réactivant la limite et le négatif du socius, au niveau de la représentation refoulante en modifiant les alliances, au niveau du représenté déplacé en travaillant les limites internes au socius. »20)

    La figure du migrant considérée comme une figure de frontière est confrontée à la déqualification statutaire, à la souffrance d’une symbolisation réductrice, à l’absence d’intraduisibles significations, et à la non‐reconnaissance. Dans ce sens, la figure de frontière se caractérise d’abord en tant qu’une figure de l’exclu suscitant une étrangeté dans la sérénité (une potentialité négative). Ensuite, elle se caractérise comme une création de nouveaux espaces avec de nouvelles représentations (le travail du frontalier) où est impliquée toutefois la phobie, plus particulièrement phobie de l’étranger. De ce point de vue, le travail de migrant serait de transformer l’étrangeté en familier.

    Pour résumer on peut qualifier la figure de frontière en trois notions : l’originalité, la rupture et la légitimation. En effet, l’établissement de frontière délimite un lieu original qui est caractérisé par la rupture avec les lieux antérieurs et par la légitimation entraînée par cette rupture qui cependant nous rend étranger au lieu originaire, et pour une part étranger à nous-mêmes. Et comme la nouvelle position suscite son illégitimité, elle « oblige à un travail de légitimation sous une double dimension, celle du fondement, de l’épistémé qui invite à une reconstruction de l’origine, celle de la reconnaissance nécessitant le jugement épistémique de l’autre. »21)

       5. La notion de ≪ citoyen du Monde ≫

    Souvent on évoque la situation d’immigration dans l’opposition entre deux cultures ; l’opposition spatiale entre deux pays est présentée comme l’opposition entre là-bas et ici. Cette opposition entraîne une opposition temporelle entre passé et présent ou avant et maintenant. Ces oppositions sont accompagnées d’une opposition entre deux langues porteuses de représentations de deux mondes différentes, de deux communautés et de deux mémoires sociales.

    Dans ces oppositions spatiale et temporelle, l’immigré se trouve dans un espace où la comparaison permet au sujet immigré « de ne se situer ni tout à fait dans l’une, ni tout à fait dans l’autre de ces communautés, mais d’adopter une position intermédiaire qui autorise une vision extérieure et critique. La comparaison ouvre ainsi l’entredeux, zone incertaine qui se situe entre les deux mémoires sociales de référence. »22)

    Arraou évoque trois types d’identités sociales des exilés basées sur la fonction d’étayage identitaire des cadres sociaux : les « nostalgiques », les « amnésiques » et les « citoyens du monde ».23) Les exilés de type nostalgique parlent de « là-bas – maintenant », ce qui leur permet de restituer la communauté d’origine dans leurs cadres sociaux actuels.

    Les exilés de type amnésique parlent d’« ici, aujourd’hui » et réalisent l’assimilation par le rejet du passé où « un conflit identitaire peut être sous‐jacent, s’accompagnant d’une dévalorisation de la communauté d’origine et d’une idéalisation de la communauté d’accueil, et s’exprimant parfois par un refus du retour au pays natal. »24)

    Le troisième type d’identité chez les exilés est défini comme l’identité de « citoyen du monde » dans laquelle les gens « ne se reconnaîtront ni tout à fait d’ici, ni tout à fait là-bas, mais dans un entre-deux-interculturel. L’identité sociale de ces migrants ne peut plus alors se définir exclusivement en termes d’endogroupe et d’exogroupe, mais doit l’être aussi en termes d’intergroupe. »25)

    Selon l’auteur, ces migrants définis comme « citoyen du monde » peuvent se situer non à l’union mais à l’intersection des deux communautés, dans un entre‐deux qui exclut une partie de la communauté d’origine et une partie de la communauté d’accueil. Ainsi, la situation interculturelle pourrait aussi être qualifiée de marginale où les sujets se situent en marge des deux communautés nationales.

       6. La notion de ≪ figure de double ≫ ; ≪ le double de migrant ≫

    Certains chercheurs évoquent la notion de « l’identité double » pour décrire l’identité des immigrés qui se trouvent entre deux cultures. Selon Sinatra,26) plusieurs sortes d’identités peuvent être distinguées chez l’exilé où l’identité double se présente comme l’aboutissement du processus d’adaptation.

    Il évoque l’identité errante et l’identité double en fonction de trajectoire identificatoire de l’exilé. Selon l’auteur, la première étape d’identité de l’exilé serait l’identité errante qui correspond à une recherche exploratoire de modèles identificatoires différents. L’identité double qui réunit les deux mondes parfois contradictoires constituerait le final d’identité de l’exilé dans son processus de l’adaptation identitaire. Selon l’auteur, l’enjeu de l’exilé serait l’hybride qui signifie une unification des racines et l’autre culture ; de la langue maternelle et l’autre langue et de la nostalgie et la curiosité. Cet hybride serait une nécessité pour ne pas courir le risque de se débrider dans une situation d’immigration.

    Nathan en soulignant la notion de « double » au sens psychanalytique, soulève l’importance de « l’identité double » dans le cadre thérapeutique, notamment chez les patients immigrés ; ainsi dit-il qu’« en clinique ethnopsychiatrique, nous pouvons percevoir une position du sujet vis-à-vis de sa propre culture semblable aux situations de double. (⋯) Nous avions même constaté que thérapeute et patient devaient partager un double culturel commun, pour instaurer le cadre thérapeutique. »27)

    Le thème de double évoque la rencontre avec la familiarité et « l’inquiétante étrangeté » qui sont la rencontre avec un double étranger, double sortie de l’ombre qui n’a pas d’image spéculaire. On peut évoquer ici la fonction persécutoire du double lorsqu’il s’inscrit sur le modèle du fantôme, du spectre dont l’une des caractéristiques fréquentes est de ne point avoir de reflet. Selon Lorreyte, « refoulé ou projeté au dehors, le Double apparaît bien comme l’ombre intime de l’identité. (⋯) Mais il en est aussi la menace permanente comme force subversive de toute fiction de l’Un. »28)

    Dans la théorie freudienne, le double représente d’une part les angoisses, angoisse d’anéantissement et angoisse de castration, et d’autre part les stades d’évolution ultérieurs du Moi tel que le narcissisme primaire. Le double est un témoin des potentialités du Moi se trouvant face aux effets destructurants de ce qu’il est en train de conceptualiser comme pulsion de mort : « le double était à l’origine une assurance contre la disparition du moi, un ‘‘démenti énergique de la puissance de la mort’’(O. Rank), et il est probable que l’âme ‘‘immortelle’’ a été le premier double du corps. »29)

    Lorreyte dit que le double « inscrit d’emblée et simultanément l’identité du Sujet (en tant qu’image de Soi) et l’identité de l’Autre (en tant qu’image de l’Autre) dans le registre de l’imaginaire. »30) Et l’auteur continue en disant que « cette capture spéculaire, si elle permet la jubilation d’une première appréhension totalisante de soi (qui vient ainsi annuler ou effacer les angoisses dépressives ou de morcellement), se renverse quasi immédiatement en angoisse de non coïncidence à soi et dépendance par rapport à une capture dans le désir d’autrui. »31)

    Selon Couvreur, le double occupe une place de choix dans toutes les créations humaines. Ce double peut être frères, amis, confrères, image renvoyée par le miroir, etc. En effet, étant considéré comme le premier fonctionnement psychique, « toujours susceptible de ressurgir », le double peut être médiateur créé en lui‐même, l’alter ego, la figure maternelle ou paternelle ; « il s’agit là d’une ‘‘création’’, dont le rôle est essentiellement médiateur. Face à l’expérience inéluctable de l’altérité de l’objet, de la différenciation –d’identité sexuelle et de génération‐ comme à celle de l’ambivalence, le sujet crée un double, identique mais déjà autre, garant narcissique et/ou persécuteur. »32)

    Dans cette perspective, le « double de migrant » implique deux aspects, aspect du double au sens propre et aspect de double culturel. En ce qui concerne le double de migrant, il faut d’abord évoquer que chaque culture dispose de son double, ombre, miroir, fantôme, etc. Ainsi, l’immigré se trouve non seulement devant deux cultures, deux codes sociaux différents, mais aussi il fait face au double de sa culture d’origine et au double de sa culture d’adoption.

    Et il doit faire face également à son propre double, la mort, l’étranger en soi. Le migrant chercherait la mêmeté dans l’autre culture ou dans le double de l’autre culture. Et il chercherait aussi l’étranger, l’autre culture dans sa culture d’origine ou dans le double de sa culture d’origine. Le double représenterait l’ombre intime de l’identité de soi qui implique l’ombre intime de l’identité de l’autre.

    Ainsi, le travail psychique de double de migrant consisterait, comme dans le double, à opérer « la distinction entre une problématique de l’ombre, comme négatif du reflet ou encore de l’image du miroir (⋯) et une problématique du double, subdivisée selon le registre de la perte‐division et selon le registre du surnombre‐duplication. »33)

    11)Cf. Mucchielli A. (1992), L'identité, Paris, P.U.F., Que sais-je.  12)Erikson E.H. (1968), Adolescence et crise. La quête de l'identité, Ed. Flammarion, Paris, 1996, p. 183.  13)Cf. Coulon A. (1992), L'Ecole de Chicago, Paris, P.U.F., Que sais-je ?.  14)Coulon A. (1992), op. cit., p. 54.  15)Coslin G. (1996), Les adolescents devant les déviances, Paris, PUF, p. 48.  16)Coslin G. (1996), Idem.  17)Coulon A. (1992), L'Ecole de Chicago, Paris, P.U.F., Que-sais-je? p. 55.  18)Cf. Cusson M. (1998), La criminologie, Paris, Hachette.  19)Raoult P.A. (1989), Le « paradoxe accepté » ou l’effet singulier de l’identité négative, in Identité, culture et situation de crise, Paris, La pensée sauvage, p. 56.  20)Raoult P.A. (1989), op. cit., p. 59.  21)Raoult P.A. (1989), op. cit., p. 56.  22)Arraou P. (1999-a), Le rôle des cadres sociaux dans la dynamique identitaire. L’exilé, une identité entre deux mémoires sociales, in De l’identité du sujet au lien social, Paris, PUF, p. 80.  23)Arraou P. (1999-b), Transmission de la langue maternelle et inscription identitaire du migrant dans les cadres sociaux de la mémoire in De l’identité du sujet au lien social ; L’étude des processus identitaires, Paris, PUF, p. 271.  24)Arraou P. (1999-b), op. cit., p. 273.  25)Arraou P. (1999-b), Idem.  26)Sinatra F. (1998), La figure de l’étranger et l’expérience de l’exil dans la cure, in Différence culturelle et souffrances de l’identité, Paris, Donod, pp. 131‐152.  27)Nathan T. (1986), La folie des autres ; traité d’ethnopsychiatrie clinique, Paris, Dunod, 2001, p. 57.  28)Lorreyte B. (1986), Identité et altérité ; une approche de l’hétérophobie, in L’interculturel en éducation et en sciences humaines, Université de Toulouse‐le Mirail, p. 546.  29)Couvreur C. (1995), Les « motifs » du double, in Le double, monographies de la revue française de psychanalyse, PUF, 1997, p. 20.  30)Lorreyte B. (1986), op. cit., p. 545.  31)Lorreyte B. (1986), Idem.  32)Couvreur C. (1995), op., cit., p. 21.  33)Nathan T. (1986), op. cit., p. 60.

    Ⅳ. Conclusion

    Les adolescents en situation d’immigration se trouvent dans plusieurs cultures, en particulier entre culture du pays d’origine et culture du pays d’accueil. En devenant adolescents, ils se confrontent à la question de « qui suis-je » où sont impliqués davantage qu’auparavant les valeurs et les références culturelles avec le développement de sentiment groupal et culturel.

    Les adolescents immigrés ont du mal à avoir un sentiment d’appartenance dans la société où ils vivent et ils sont amenés à créer leur propre identité dans cet espace, qui n’est ni l’identité du pays d’origine, ni l’identité du pays d’accueil. Ils créent leur espace propre et ils prennent l’identité convenant à cet espace. Ainsi, le processus de la double socialisation chez les immigrés s’effectuerait dans l’espace intermédiaire culturel dans le but de l’adaptation du pays de résidence tout en intégrant à la fois la culture du pays d’origine et du pays de résidence.

    Ce que nous pouvons retenir dans cette recherche, c’est que probablement il s’agirait là de quelque chose de l’ordre d’une troisième identité chez l’immigré ; d’une troisième identité toute simple, ou se manifestant sous différentes et diverses formes positives ou négatives.

    En effet, toutes ces notions d’identité évoquées désignent un ordre d’un troisième type d’identité qui n’est ni l’identité du pays d’accueil ni l’identité du pays d’origine mais existe comme une identité en tant que telle. Cette identité que nous appelons « une troisième identité » signifie « une identité originale » et non une identité des mélangée.

    Chez les adolescents immigrés, nous pensons que la problématique d’identité est étroitement liée à cette troisième identité qui implique l’idée d’une modification dont le but est d’assurer l’harmonie en interaction chez l’individu. Cette troisième identité serait une résultante outre un ensemble de multi-factorialité inhérente à la situation migratoire et elle serait une sorte de cristallisation des liens entre les problématiques d’ordre individuel et celles d’ordre collectif.

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